Carine Kanimba, fille adoptive de l’opposant rwandais emprisonné Paul Rusesabagina, a appelé mercredi le président Paul Kagame à libérer son père, jugeant que son sort était entre ses mains, lors d’une conférence de presse à Bruxelles.
« Paul Kagame est l’homme qui détient mon père, c’est la seule personne qui peut prendre la décision de le libérer. Qu’il cherche dans son coeur cet espace pour libérer notre père », a lancé Mme Kanimba, en exprimant de nouveau son inquiétude sur la santé de cet homme qui est aussi citoyen belge et aura 68 ans en juin.
Selon ses proches, Paul Rusesabagina, dont la condamnation à 25 ans de prison pour « terrorisme » a été confirmée en appel le 4 avril, a été victime il y a quelques semaines en prison d’un accident vasculaire cérébral (AVC) sur lequel aucun diagnostic fiable n’a été posé.
De plus il souffre de fortes douleurs à un bras laissant craindre « un arrêt cardiaque », d’après sa fille. « Il a été vu à l’hôpital par un cardiologue et un oncologue qui ont évoqué un problème psychologique et en aucun cas physique », a dénoncé Carine Kanimba, pour qui les séquelles constatées par plusieurs visiteurs – une lèvre déformée et une moitié de visage paralysée – ne devraient pourtant susciter aucun doute sur l’AVC.
Fervent opposant de Paul Kagame depuis plus de 20 ans, Paul Rusesabagina a été rendu célèbre par le film « Hôtel Rwanda » sorti en 2004. Ce long métrage raconte comment ce Hutu modéré qui dirigeait l’Hôtel Mille Collines de Kigali a sauvé plus de 1.000 personnes durant le génocide de 1994, au cours duquel 800.000 personnes ont été tuées, selon l’ONU, principalement issues de la minorité tutsi.
M. Rusesabagina vivait depuis 1996 en exil aux Etats-Unis et en Belgique, avant d’être arrêté à Kigali en août 2020 dans des circonstances troubles, à la descente d’un avion qu’il pensait à destination du Burundi. Ses proches ont dénoncé « un enlèvement ».
A l’issue d’un procès en 2021 que la Belgique a considéré ni « juste » ni « équitable », il a été condamné à 25 ans de prison pour « avoir fondé et appartenir » au Front de libération nationale (FLN), groupe armé accusé d’avoir mené des attaques meurtrières au Rwanda en 2018 et 2019. Mercredi son avocat belge Vincent Lurquin a de nouveau qualifié ce procès de « mascarade ».
« Le Rwanda de Paul Kagame est malheureusement connu pour la persécution des opposants politiques », a souligné pour sa part la députée chrétienne-démocrate flamande Els Van Hoof, qui préside la commission des Relations extérieures à la Chambre.
Tous s’exprimaient devant la presse à Bruxelles en plein lancement d’une campagne internationale baptisée « Free Rusesabagina », qui a été relayée aux Etats-Unis par des stars hollywoodiennes posant en tee-shirt à l’effigie de l’opposant.
AFP