L’escalade des hostilités dans la province du Nord-Kivu, dans l’est de la République démocratique du Congo, fait peser le risque d’une extension du conflit à l’échelle régionale, a prévenu mardi l’envoyée de l’ONU dans ce pays.
La Représentante spéciale du Secrétaire général pour la RDC et cheffe de la Mission des Nations Unies dans ce pays (MONUSCO), Bintou Keita, a fait un exposé par visioconférence, depuis la capitale congolaise Kinshasa, aux membres du Conseil de sécurité sur « la situation profondément inquiétante » autour de Sake et Goma, dans la province du Nord-Kivu, où les hostilités entre le groupe armé M23 et les Forces armées congolaises (FARDC) se sont considérablement intensifiées.
Nouveaux déplacements de populations
Les combats entre le M23 et les FARDC ont entraîné de nouveaux déplacements de populations vers Goma et le Sud-Kivu. Le 12 février, les offensives du M23 ont poussé les forces armées congolaises, les FARDC, à se repositionner à l’est de la ville Sake.
« Bien qu’elle ait essuyé des tirs et été prise pour cible, la MONUSCO a maintenu ses positions défensives à l’ouest de Sake. La ville de Sake reste sous le contrôle des FARDC, avec le soutien de la MONUSCO », a-t-elle précisé.
Selon la cheffe de la MONUSCO, « il est crucial de souligner le risque d’une extension du conflit à l’échelle régionale si les efforts diplomatiques en cours, visant à apaiser les tensions et à trouver des solutions politiques durables au conflit actuel, échouent ». Elle a appelé le Conseil de sécurité à peser de tout son poids sur les initiatives de paix régionales en cours et veiller à ce que toutes les parties respectent le droit international, leurs engagements, et œuvrent de manière constructive pour mettre fin à la crise actuelle.
Selon Mme Keita, bien que l’escalade du conflit à Goma et dans ses environs soit une préoccupation majeure, la situation sécuritaire dans d’autres zones du Nord-Kivu, de l’Ituri et du Sud-Kivu suscite également une profonde inquiétude pour la MONUSCO.
Dans la région de l’Ituri, on observe une escalade significative de la violence dans le territoire de Djugu, où la MONUSCO continue d’assurer la protection physique directe de plus de 100.000 personnes déplacées. La cheffe de la MONUSCO a dit redouter fortement que la situation en Ituri ne dégénère davantage, compromettant ainsi les progrès réalisés par la Mission onusienne et les autorités provinciales pour soutenir le processus de paix en cours dans la région.
Dans le Sud-Kivu, où la MONUSCO se prépare à se retirer dans quelques mois, des affrontements ont éclaté entre les milices Twirwaneho et des groupes Maï-Maï dans le sud de Minembwe. Mme Keita a indiqué qu’elle se rendrait la semaine prochaine à Bukavu et à Uvira pour dialoguer avec les autorités provinciales et les organisations de la société civile afin d’évaluer la mise en œuvre du désengagement.
Aggravation de la situation humanitaire
Selon l’envoyée de l’ONU, les combats dans le Nord-Kivu ont encore aggravé une situation humanitaire déjà désastreuse. Les conditions de vie dans les sites de déplacement extrêmement surpeuplés à Goma et aux alentours sont désespérées, a-t-elle noté, alors que plus de 400.000 personnes déplacées ont désormais trouvé refuge dans la ville, dont 65.000 au cours des deux dernières semaines, provoquant une augmentation spectaculaire des cas de choléra en raison du manque d’eau potable, d’hygiène et d’assainissement adéquats.
L’accès restreint aux territoires contrôlés par le M23 isole Goma des territoires intérieurs et perturbe la production alimentaire et les chaînes d’approvisionnement. Les prix des produits de base à Goma sont en hausse, augmentant le risque de troubles publics.
Mme Keita a également observé que le redéploiement des FARDC au front avec le M23 a exacerbé le vide sécuritaire dans d’autres territoires du Nord-Kivu, notamment à Beni, Lubero et Walikale, et attiré de nouveaux combattants, notamment du Sud-Kivu. Elle s’est dit profondément préoccupée par les graves violations et atteintes aux droits humains internationaux et au droit international humanitaire commises dans les zones sous le contrôle du M23, où le mouvement cible les acteurs de la société civile, en particulier les défenseurs des droits humains, et les journalistes.