Le moment le plus attendu depuis l’ouverture en Guinée du procès du massacre de septembre 2009, la comparution de Moussa Dadis Camara, a tourné court lundi quand la cour a accepté la demande de renvoi de l’ancien dictateur pour raisons de santé.
Le moment de la comparution est arrivé en fin de matinée quand le président Ibrahima Sory Tounkara a déclamé: « Monsieur Moussa Dadis Camara, venez à la barre, s’il vous plaît ». Moins de 12 minutes plus tard, le même président prononçait le renvoi de l’affaire au 12 décembre 2022 avec ces mots: « Vous avez une semaine M. Camara, l’audience est levée ».
Dans l’intervalle, l’ancien autocrate âgé de 57 ans, qui faisait trembler ceux qui subissaient ses foudres, a plaidé avec obséquiosité pour le renvoi en invoquant sa santé. « Avec tout le respect que j’ai pour votre auguste tribunal – j’en ai déjà informé le directeur de la garde pénitentiaire, le médecin chef de la garde pénitentiaire – depuis un très bon moment je souffre », a dit le capitaine Camara après s’être présenté à la barre d’une démarche mal assurée et en tenue civile, lui qui ne se départissait jamais de son uniforme.
« Je ne suis pas au-dessus de la loi », a-t-il dit, « mais en toute sincérité je ne me sens pour le moment abolument pas (en état de déposer) ». Le principal accusé de ce procès historique a vaguement évoqué « le palu que j’ai eu, un affaiblissement total », et laissé entendre qu’il préférait ne pas s’étendre.
« Le tribunal ne peut pas vous obliger à dire ou à faire ce que vous ne voulez pas faire (…) Si vous dites que vous ne pouvez pas (déposer), le tribunal vous suivra », a dit le président avant d’annoncer le renvoi. Le capitaine Camara répond depuis le 28 septembre 2022 avec une dizaine d’anciens responsables militaires et gouvernementaux du massacre perpétré 13 ans plus tôt jour pour jour.
Le capitaine Camara, porté au pouvoir par un coup d’Etat neuf mois auparavant, était président ce jour et les suivants où les Bérets rouges de sa garde, des soldats, des policiers et des miliciens ont assassiné dans un stade de Conakry et alentour des dizaines de personnes réunies pour le dissuader de se présenter à la présidentielle prévue en janvier 2010.
Des dizaines de femmes ont été violées, des individus séquestrés et torturés, de nombreux corps escamotés. Ecarté quelques mois après le massacre, exilé ensuite au Burkina Faso, il a été emprisonné après être rentré pour le procès.
AFP