La justice française a condamné un ex-ministre de la Justice burundais et son épouse à payer près de 2 millions d’euros à un compatriote qu’ils avaient exploité pendant une dizaine d’années à leur domicile.
En mars 2021, la cour d’appel de Versailles (région parisienne) avait infligé à Gabriel Mpozagara et à sa femme une peine de deux ans d’emprisonnement avec sursis pour « traite d’être humain », « travail dissimulé » et « aide à l’entrée et au séjour irrégulier » d’un ressortissant étranger. Ce jugement avait confirmé la peine prononcée en première instance contre le couple.
« La relation de travail (a été requalifiée) en CDI à temps plein », peut-on lire dans la décision du conseil des prud’hommes rendue le 1er février que l’AFP a consultée. Ils peuvent faire appel de ce jugement. Dans le détail, M. et Mme Mpozagara doivent verser 1,756 million d’euros au titre des salaires et congés payés non versés, auquel s’ajoutent des sommes en réparation de différents préjudices, dont la privation d’un logement et d’une alimentation dignes.
« Un jugement remarquable », ont réagi auprès de l’AFP les avocats de la victime Martin Pradel et Alexandre Reynaud, jugeant « que ce n’est qu’en obtenant effectivement une réparation proportionnée (…) que nous obtiendrons que la lutte contre l’esclavage moderne soit effective ».
En février 2021, Méthode S., cultivateur burundais, avait expliqué devant la cour d’appel de Versailles comment il avait été « forcé » à « travailler dans la peur » pendant dix ans dans la maison du couple, qui lui avait confisqué son passeport. Ménage, repassage, jardinage… « Si je ne le faisais pas, ils ne me donnaient pas à manger », avait-il soutenu.
En 2018, averties par une commerçante, les forces de l’ordre avaient découvert dans la villa de l’ex-ministre et ancien diplomate de l’Unesco Gabriel Mpozagara à Ville-d’Avray (région parisienne) un homme « amaigri et manifestement apeuré » au sous-sol, dans une pièce insalubre.
Dans le volet pénal de cette affaire, la cour d’appel de Versailles avait condamné les dignitaires à verser des dommages et intérêts à Méthode S. à hauteur de 50.000 euros pour atteinte à la dignité et 20.000 euros au titre du préjudice affectif, le père de famille n’ayant pu voir sa femme ni ses enfants pendant des années. Le couple avait déjà été condamné en 2007 en France mais relaxé en appel dans un dossier similaire qui concernait deux de leurs nièces venues du Burundi.
AFP