Les émeutes meurtrières qui ont secoué l’Afrique du Sud en juillet après l’incarcération de l’ex-président Jacob Zuma ont révélé d’importantes failles au sein du renseignement, pointe un rapport publié lundi, qui met aussi en cause les divisions au sein de l’ANC, parti historique au pouvoir.
« Les structures du renseignement n’ont pas réussi à anticiper les violences et à y répondre de manière adéquate », affirme le texte rédigé par un panel d’experts choisi par le gouvernement pour enquêter sur ces violences, les plus graves depuis la fin de l’apartheid, qui ont fait plus de 350 morts.
Le renseignement sud-africain « n’a pas réussi à prévoir la nature, l’ampleur et le modus operandi » de ces violences, et la faiblesse des forces de sécurité, rapidement dépassées, a montré que la police ne disposait pas de « capacités suffisantes » pour les juguler, accable le rapport.
Selon ces experts, les informations recueillies suggèrent « que les différences internes au sein du parti au pouvoir, l’ANC, ont contribué aux troubles ». Le Congrès national africain, divisé principalement entre partisans de l’actuel président Cyril Ramaphosa et ceux de M. Zuma, tombé en disgrâce pour corruption, avait admis que certaines des personnes ayant « incité » à la violence étaient des membres de ce parti. Mais le rapport précise qu’il « n’est pas clair si des mesures disciplinaires ont été prises » contre ces derniers.
Dans un discours prononcé lors de la réunion de son parti le mois dernier, M. Ramaphosa avait fait remarquer que « les divisions et les factions au sein de l’ANC (étaient) en train de devenir une menace pour notre démocratie ».
Les premiers incidents –camions incendiés, routes bloquées — avaient été attribués à des partisans de M. Zuma, qui s’était finalement rendu dans un commissariat début juillet, après avoir entretenu le suspense, pour être incarcéré.
La plus haute cour du pays l’avait condamné à une peine de prison ferme pour avoir obstinément refusé de comparaître devant une commission enquêtant sur la corruption d’Etat sous sa présidence (2009-2018). Dans la foulée de ces premiers incidents qui ont servi de déclencheur, des foules déchaînées avaient envahi centres commerciaux et entrepôts, principalement à Johannesburg et autour du port de Durban, emportant téléviseurs, frigos, canapés en cuir, alimentation, dans la plus grande confusion.
« La police a admis que le nombre de personnes était écrasant » et que leurs méthodes, pillages massifs et incendies de bâtiments industriels et commerciaux, les avaient « surpris », avance le rapport. Ces violences ont été largement organisées via les réseaux sociaux, mais leurs meneurs restent « en grande partie non-identifiés », s’inquiète-t-il.
À ce jour, aucun des instigateurs n’a été arrêté, ce qui est « préoccupant », soulignent les experts. Seules huit personnes ont comparu devant un tribunal dans le cadre de ces émeutes. La police n’a pas réussi à « adapter ses tactiques à la situation à laquelle elle était confrontée », charge encore le texte, ajoutant qu’elle était « insuffisamment équipée et qu’elle manquait de matériel de contrôle des foules ». « Il ne fait aucun doute que la police n’avait pas la capacité suffisante pour mettre fin à la violence », ajoute le rapport.
Quelques jours après le début des troubles, le président Cyril Ramaphosa avait déployé environ 25.000 soldats avant que l’ordre ne soit rétabli. Le calme revenu, il avait supprimé le ministère de la Sécurité d’Etat et placé les services de renseignement sous son autorité directe.
AFP