Trois Tunisiens condamnés à 30 ans de prison pour consommation de cannabis sont jugés en appel mardi dans cette affaire qui a relancé le débat sur la stratégie du tout répressif en matière de drogues.
La Cour d’appel du Kef, dans le nord-ouest de la Tunisie, devrait rendre sa décision dans la journée. Les trois hommes ont été jugés coupables le 20 janvier de consommation de stupéfiants en bande et en récidive, dans un lieu public aménagé pour la vente ou la consommation, d’où la peine particulièrement lourde.
Un quatrième, arrêté à proximité, a été condamné à de cinq ans de prison.Selon la défense, ils avaient partagé un joint dans un vestiaire désaffecté après un match de football entre amis dans un ancien stade de cette région agricole marginalisée.
« Le stade est en piteux état, c’est exagéré de parler de lieu public, et ils n’utilisaient pas régulièrement les lieux pour y consommer du cannabis », a souligné mardi à l’AFP Me Hassina Darragi, l’une des avocates de la défense. »Nous avons beaucoup d’espoir vu le débat » qu’a déclenché le verdict en première instance, a-t-elle ajouté.
La condamnation à 30 ans de prison a été dénoncée par de nombreuses organisations de défense des droits humains, lors de récentes manifestations à Tunis et sur les réseaux sociaux avec le hashtag en arabe « #la prison-non, changez la loi 52 ».
Cette loi prévoit de lourdes peines de prison pour la détention et la consommation de cannabis et conduit à l’incarcération de nombreux jeunes fumeurs de joints.Face au tollé suscité par la lourde condamnation, des responsables politiques ont plaidé pour son assouplissement.
Le chef du gouvernement Hichem Mechichi a appelé récemment à des « peines alternatives » à la prison et plusieurs projets de loi sont en préparation, dont l’un vise à légaliser la production et la vente de cannabis.
Le Collectif pour la légalisation du chanvre (Colec), lancé en 2019, fait état d' »un million de consommateurs, dont 400.000 réguliers ». « C’est presque un dixième de la population et plus de 30% des jeunes », souligne-t-il.
En 2019, 21,5% des personnes détenues l’étaient pour des infractions liées aux stupéfiants, en large partie pour une simple consommation de cannabis, selon un rapport d’Avocat sans frontières.
AFP