Le 2 octobre 2024, la Guinée célèbre le 66ème anniversaire de son indépendance. Ce jour mémorable rappelle la proclamation historique du 2 octobre 1958, lorsque le pays, sous la houlette de son premier président, Ahmed Sékou Touré, a rejeté l’offre de rester dans la Communauté française, devenant ainsi l’un des premiers pays d’Afrique à obtenir son indépendance. Alors que la Guinée commémore cette date charnière, le bilan de six décennies d’autonomie politique reste mitigé, marqué à la fois par de grandes promesses et des défis persistants.
La Guinée est souvent qualifiée de « scandale géologique » en raison de la richesse de son sous-sol. Le pays dispose de vastes réserves de bauxite, de fer, d’or et de diamants. Ses ressources naturelles, en particulier la bauxite, font de la Guinée l’un des plus grands producteurs mondiaux. Pourtant, malgré ces abondantes ressources, la majorité des Guinéens continue de vivre dans la pauvreté, et le pays peine à se développer.
Le paradoxe entre la richesse minière et le sous-développement de la Guinée est dû, en grande partie, à une gestion économique inefficace, souvent caractérisée par la corruption et un manque de transparence. Les revenus générés par les ressources naturelles n’ont que rarement été réinvestis dans les secteurs essentiels tels que l’éducation, la santé ou les infrastructures. Au lieu de cela, une grande partie de cette richesse a été accaparée par une élite restreinte, laissant les populations locales sans accès aux services de base.
Depuis son indépendance, la Guinée a été en proie à une instabilité politique chronique. La succession de régimes autoritaires, souvent dirigés par des militaires arrivés au pouvoir par des coups d’État, a profondément affecté le développement du pays. Après le règne autoritaire de Sékou Touré, le pays a connu une série de transitions politiques marquées par des prises de pouvoir brutales.
L’une des périodes les plus marquantes a été le régime de Lansana Conté, un militaire arrivé au pouvoir à la suite d’un coup d’État en 1984. Son long règne de 24 ans, malgré quelques réformes économiques, a été entaché de corruption et de violations des droits de l’homme. Après sa mort en 2008, une nouvelle ère d’instabilité s’est ouverte avec un autre coup d’État militaire, mené par le capitaine Moussa Dadis Camara. Cette période a encore aggravé la crise politique et économique du pays.
En 2021, un autre coup d’État a renversé le président Alpha Condé, élu démocratiquement mais accusé d’avoir tenté de s’accrocher au pouvoir après un troisième mandat controversé. La prise de pouvoir par le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD) sous la direction du colonel Mamady Doumbouya devenu général sous cette transition, a renouvelé les espoirs de réformes, mais les progrès restent lents. La gouvernance militaire a souvent été synonyme de répression des libertés, d’instabilité et d’un manque de vision à long terme, des éléments qui ont freiné le développement économique et social du pays.
Malgré cette histoire tumultueuse, la Guinée reste un pays aux potentiels énormes. Le sous-sol riche du pays, s’il est mieux exploité et géré de manière transparente, pourrait offrir des opportunités de développement considérables. La diversification économique, avec un accent sur les secteurs agricole et industriel, pourrait aider à réduire la dépendance excessive aux ressources minières et à offrir des emplois durables à la population jeune du pays.
L’actuelle transition politique, bien que fragile, représente une occasion pour la Guinée de rompre avec le cycle des coups d’État et de mettre en place des institutions démocratiques solides. La tenue d’élections transparentes et inclusives, ainsi qu’une lutte sérieuse contre la corruption, sont essentielles pour stabiliser le pays et permettre une meilleure gestion de ses ressources.
À l’heure où le pays célèbre ses 66 ans d’indépendance, les Guinéens espèrent que cette commémoration symbolise non seulement la mémoire de leur lutte pour la liberté, mais aussi un nouveau départ vers un avenir plus prospère et plus équitable. Pour que la Guinée puisse véritablement se développer et que son peuple puisse enfin profiter de ses ressources naturelles, des réformes profondes et une transition vers un régime civil démocratique s’imposent.
La rédaction