Un procès aux assises a été ordonné en France contre un ex-commandant rebelle libérien accusé d’actes de torture pendant la guerre civile au Liberia, en 1993 et 1994, a appris jeudi l’AFP de source judiciaire.
Dans son ordonnance de mise en accusation datée du 26 novembre, le juge d’instruction Michel Raffray a renvoyé devant les assises Kunti K., 46 ans, pour « actes de torture » et « complicité d’actes de torture » constitutifs de crimes contre l’humanité.
Né en 1974, Kunti K. a été commandant au sein de l’ULIMO (United Liberation Movement of Liberia for Democracy), faction de trois groupes armés hostiles au mouvement de l’ex-président libérien Charles Taylor (le Front national patriotique du Liberia, NPFL), au moment de la première guerre civile dans ce pays d’Afrique de l’Ouest.
Ce responsable d’une faction dans le comté du Lofa, une région stratégique au nord-ouest du Liberia, a été accusé par plusieurs victimes d’avoir commis des pillages et des viols, et réduit à l’esclavage des populations.
Il est aussi soupçonné d’avoir torturé, tué et commis des actes de cannibalisme. Ce dernier conteste ces accusations. « C’est un dossier sur lequel il n’y a aucune preuve des faits reprochés à Kunti K., et qui s’appuie sur des témoignages vieux de 25 ans », ont réagi auprès de l’AFP ses avocats, Me Tarek Koraitem et Maryline Secci. « Il sert de bouc émissaire des crimes commis au Liberia », ont-ils estimé.
« C’est un progrès pour la justice internationale et pour la lutte contre l’impunité au Liberia, où la justice locale n’est toujours pas intervenue sur les atrocités qui ont eu lieu pendant la guerre civile », s’est réjoui de son côté Me Simon Foreman, avocat de l’ONG Civitas Maxima, qui s’est constituée partie civile au côté de huit victimes dans cette enquête. « Tout repose sur la capacité des autres Etats à rendre justice », a-t-il observé.
Kunti K. ne devrait pas être jugé avant 2022, d’autant plus que le parquet national antiterroriste a fait appel de l’ordonnance du juge sur une question purement juridique.
Ce procès sera le premier instruit par le pôle crimes contre l’humanité du tribunal de Paris, créé en 2012, qui ne soit pas lié au génocide rwandais.
C’est en vertu de sa « compétence universelle » que la justice française peut poursuivre les auteurs des crimes les plus graves – crimes contre l’humanité, de guerre ou de génocide – s’ils passent ou résident sur le territoire français, quels que soient le lieu des crimes et la nationalité des auteurs ou victimes.
AFP